Le curé d'Ambricourt, un modèle christique

Dans la critique de la modernité, Bernanos est très proche de la sensibilité romantique qui stigmatise le désenchantement du monde et sa quantification. En revanche, si les romantiques assignent au poète le rôle de sauveur, ce sont les Saints qui, aux yeux de Bernanos, peuvent sauver l'homme car ils lui permettent de renouer avec le christianisme auroral et avec l'esprit d'enfance. Pour l'auteur, on ne peut renouer avec l'esprit d'enfance qu'en entrant en dissidence contre l'État moderne et contre l'Église officielle qui se sont alliés pour quantifier le monde et en expulser les univers de la qualité. À travers son chef-d'oeuvre, Journal d'un curé de compagne, Bernanos développe le type idéal de la sainteté en la personne du curé d'Ambricourt. Rongé par la maladie, il vit la passion du Christ en tant que sauveur. Il sacrifie toute son énergie à l'exercice de son ministère et à la quête de la brebis égarée. Rongé par la peur de faillir dans sa mission, il écrit son journal qui a la forme d'une confession où le curé s'adresse à son Dieu, implorant son pardon car il se considère comme un pauvre pêcheur pénitent.